A mon retour au lycée début février, j’ai voulu faire un bilan de leurs compétences graphiques en donnant aux élèves de premières un sujet de cinquième, dont voici un bel exemple...
"Ce n’était pas un arbre-monde, ni un vaisseau arbre.
J’avais entendu des légendes folles, de la bouche d’Enée, en fait, donc ce n’était pas probablement des légendes, sur un arbre anneau autour d’une étoile, un anneau fantastique de matière vivante tressée et se déployant autour d’un soleil semblable à celui du système de l’Ancienne Terre. J’avais une dois essayé de calculer combien de matière vivante cela exigerait et décidé que c’était absurde.
Ce qui se déployait de chaque côté de moi, ce qui s’incurvait sur des distances trop grandes pour que mon esprit formé sur une planète puisse l’appréhender, était une sphère de tissu végétal entrelacé, des troncs de dizaines ou de centaines kilomètres de long, des branches de plusieurs clicks d’épaisseur, des feuilles larges de plusieurs centaines de mètres, des racines s’étirant comme les synapses de Dieu sur des centaines, non… des milliers de kilomètres dans l’espace, des branches en treilles s’étirant dans toutes les directions, des troncs longs comme le Mississippi qui semblaient au loin de minuscules brindilles, un arbre grand comme mon continent natal d’Aquila, sur Hypérion, se fondant en milliers d’autres bosquets et masse de verdure, se recourbant vers l’intérieur et l’extérieur, de tous les côtés, dans toutes les directions… il y avait de nombreuses brèches noires, des trous dans l’espace, plus grands que les troncs et la dentelle de verdure qu’on voyait au travers… mais nulle parts les brèches n’étaient complètes… partout les troncs, les branches et les racines s’entremêlaient, ouvraient d’innombrables milliards de feuilles vertes au soleil qui brûlait dans le lieu géométrique du vide au centre de…
Je fermai les yeux…
– Ça ne peut être réel, dis-je.
– Si." Dan Simmons, Cycle d’Hypérion, "L’éveil d’Endymion II", SF, éd. Pocket, p.192 (citation que l’on peut trouver ici)
Autre amorce possible :
GRANDE FORÊT
Vous donnerez à voir la plus grande forêt possible. TECHNIQUE : fusain sur format raisin (sens portrait ou paysage au choix) CONTRAINTES : – réalisez un croquis préparatoire rapide (format A4 aux crayons gris/critérium)
– réalisez une représentation contrastée
– travaillez la diversité formelle des arbres et leur modelé
Critères d’évaluation :
– /3 maîtrise et diversité de la FORME
– /5 GRAPHISME (diversité du vocabulaire graphique, le geste, maîtrise du modelé, du fusain et de toutes les valeurs)
– /2 SUCCESSION DES PLANS
– /6 GRANDEUR : représentation de la profondeur, audace des ruptures d’échelle entre 1er et arrières plans, personnalisation de la représentation de ce qui est grand
– /4 TRAVAIL, INVESTISSEMENT
OBJECTIFS ET ENJEUX :
– développer les compétences graphiques (l’arbre étant une structure linéaire, c’est toujours un excellent sujet pour le dessin)
– découvrir un médium (le fusain)
– diversifier un même motif
– aborder la question de l’espace (une grande forêt dans un format raisin)
– aborder la question de la profondeur, de la succession des plans et du point de vue
– aborder le rendu du volume, le travail du modelé et de l’ombre et de la lumière
– affirmer une représentation personnelle de ce qui est grand
RÉALISATIONS :
Croquis :
Fusains :
RÉALISATIONS POUR L’ANNÉE SCOLAIRE 2014-2015 : cette fois, le sujet a été donné à réaliser en pratiquant à nouveau le fusain mais associé à l’encre colorée.
Quelques remarques des élèves de 6e4 du collège Georges Pompidou d’Orgerus où ces travaux ont été exposés dans le cadre de la liaison collège/lycée :
– "C’est très beau et bien fait." Luca B.
– "Ces oeuvres sont très jolies." Lucas C.
– "Ces oeuvres sont sinistres." Romane T.
– "Elles sont très réalistes et on dirait des photos." Elena J.
– "Ces oeuvres sont magnifiques." Loïs A.
– "Ces oeuvres sont magnifiques, il y de beaux effets." Daniel G.
– "C’est très beau et l’effet de couleur est très bien fait." Lucas Ch.
– "C’est très beau, on dirait de vrais artistes." José G.
RÉFÉRENCES :
(à lire : la superbement illustrée Anthologie poétique de La forêt, éd. du Chêne, 1997, d’où sont issues une partie de ces références)