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V, W et Y

V

VINCENT VAN GOGH : 1853-1890, peintre et dessinateur néerlandais
« Une raison de travailler c’est que les toiles valent de l’argent… Une raison de ne pas travailler, c’est que les toiles et les couleurs ne font que nous coûter des sous, en attendant. »

« Il ne faut pas être esclave de la nature, ce qui briderait l’imagination. »

« Peindre, des hommes, des femmes, avec ce je ne sais quoi d’éternel. »

« Le noir absolu n’existe pas à vrai dire. »

XAVIER VEILHAN : plasticien français, né en 1963
« Je pense que c’est la responsabilité de l’artiste de continuer à faire des choses bricolées avec trois bouts de ficelle, tout seul. »

FABIENNE VERDIER : peintre et calligraphe française, née en 1962
« Son enfance, on la subit ; sa jeunesse, on la décide. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.9

« Je compare la vie d’un homme à la terrifiante beauté d’un bonzaï ou d’un vieux pin sur les récifs en bord de mer qui a pris les plis du vent avec le temps. On le juge beau à l’automne de sa vie, mais quel sacrifice a-t-il dû accepter pour pousser ainsi ? »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.9

« On envoyait donc périodiquement les artistes « étudier auprès du peuple » dans les villages. C’était une pratique à double tranchant car elle permettait à des intellectuels et à des citadins de voir ce qui se passait réellement parmi cette majorité silencieuse de paysans vivant encore souvent dans la misère ou, du moins, dans des conditions précaires. Les artistes sont sans doute en Chine ceux qui connaissent le mieux la réalité de leur pays et ils savent qu’il existe un immense fossé entre le discours officiel et cette réalité ».
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.41

« Une fois, il me demanda si je savais monter à cheval.
Oui, lui répondis-je, et j’adore cela.
_ Comment fais-tu pour arrêter ton cheval ?
_ Je tire sur les rênes.
_ Ce geste de tension, quand tu tires sur les rênes, peux-tu le représenter dans ton trait ? »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.102

« Tout ce qui est dans la nature, tout mouvement humain est une métaphore idéale pour instruire ton esprit à transmettre la vie au trait, disait-il. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.103

« Chaque fois, il m’enseignait à l’aide d’images poétiques. Mais il ne s’agissait pas seulement d’images : il m’interdisait de peindre sans avoir à l’esprit le roulement du tonnerre, le déferlement de la vague ou le caillou qui dévale. « Ils doivent être présents dans ton esprit avant que tu poses ton pinceau sur le papier ; sans cela, tu ne parviendras pas à les traduire. Ce n’est pas un problème de technique. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.103-104

« Voici ce que le métier de votre serviteur lui a permis d’observer. Quand je fais une roue, si je vais doucement, le travail est plaisant, mais pas solide. Si je vais vite, le travail est pénible et bâclé. Il me faut aller ni lentement ni vite, en trouvant l’allure juste qui convienne à la main et corresponde au cœur. Il y a là quelque chose qui ne peut s’exprimer par les mots. »
in Tchouang Tseu, Œuvre complète, « Connaissance de l’Orient », Unesco, Paris, Gallimard, 1969, cité in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.108-109

« Je n’en pouvais plus de travailler avec de l’encre noire et je lui ai demandé si je pouvais égayer d’un peu de couleurs mes exercices : « Non seulement tu ne vas pas mettre de couleur, mais tu vas encore travailler le noir pendant des années. Tu dois arriver à percevoir que, dans le monochrome, dans les variations infinies de l’encre de Chine, tu peux interpréter les milles et une lumières de l’univers. Si tu recours maintenant à la couleur, tu n’iras plus rechercher les possibilités du lavis, la façon dont il accroche la lumière. C’est difficile, mais fais-moi confiance. Lorsqu’au bout de quelques années tu viendras à la couleur, ton interprétation de la lumière sera d’une richesse bien plus précieuse. Le noir possède l’infini des couleurs ; c’est la matrice de toutes. Même si cela te paraît aberrant, tu en seras persuadée plus tard. Avec les ressources du noir et le vide du papier blanc, tu peux tout créer, comme la nature, à l’origine, a tout créé avec deux éléments opposés et complémentaires, le yin et le yang, qui se fondent en une unité. Toutes les transformations en sont issues. Le noir est le révélateur premier de la lumière dans la matière. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.110

« La peinture chinoise est une peinture de l’esprit ; elle ne vise qu’à transmettre l’esprit des choses à partir des formes qui ne sont qu’un moyen. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.110

« Il répétait sans cesse : « Pour trouver l’unité du pinceau, il faut apprendre l’opposition et la complémentarité. Je ne veux pas d’un trait trop souple ou trop enlevé ou trop rugueux ; il doit être preste et retenu ; empreint ni de force ni de mollesse. Il faut allier puissance et délicatesse. La touche ne doit être ni trop légère ni trop lourde. Appuie sur le trait, mais avec un poids plume ; que ton pinceau ne soit ni trop sec ni trop mouillé ; que ta touche ne soit pas trop onctueuse. Il faut trouver le juste milieu pour saisir la vie. Tout est dans la juste mesure des oppositions. En Occident, vous aimez les extrêmes ; pour vous, le juste milieu est synonyme de fadeur. Pour nous Chinois, le juste milieu, c’est épouser la vie, la paix. L’harmonie de la nature est basée sur le juste milieu. Travaille dans cette direction et une dynamique naturelle naîtra dans tes œuvres qui trouveront alors leur unité et une qualité physique organique. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.111

« J’aimais sa phrase : « La mémoire, cette trace furtive, éphémère, nous enseigne doucement, mais sûrement, la saveur de l’immortalité. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.112

« Tu ne sais pas à quel point tu viens de me faire plaisir ! Il y a des gens à qui une vie entière ne suffit pas pour comprendre leur ignorance. [...] Le fait que tu reconnaisses que tu es une ignare devant l’éternel, c’est l’attitude que je désirais que tu aies pour approcher la peinture. C’est la seule attitude valable pour devenir peintre ; sinon, ce n’est pas la peine de s’y mettre. Enfin une compréhension soudaine, juste, de la réalité ! »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.113

« Il m’a aussi enseigné à vivre les moindres gestes de la vie quotidienne, car c’est en eux que le peintre trouve son inspiration. Une réceptivité totale nous rend attentifs aux vibrations des choses, à la nuance de l’aube. Il m’a appris, en me levant, à sentir la brume matinale qui varie chaque jour. Elle éclaire un aspect de soi encore inexploré, un sentiment ignoré. « On enrichit sa peinture en vivant pleinement l’humeur du jour, disait-il. Le peintre ne copie pas la nature, en même temps elle est sa révélation première ; il en restitue les traits, les états, l’ossature. Un brin d’herbe est source de connaissance. Il apprend la ligne drue, coupante, dense. La danse de l’oiseau en vol t’indique comment se déployer, prendre son élan, piquer vers le sol. Il faut te nourrir des vies qui t’entourent. Elles provoqueront des émotions et des perceptions de plus en plus riches et variées. Le peintre, au cours de son existence, se construit une banque de données psychiques à partir de sa connivence avec le monde. C’est ce qu’il restitue dans son trait. Un jour, de cette banque de données naîtra naturellement, en un geste spontané, un acte créatif. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.114

« Que vois-tu là ?
_ Une forme qui prend vie.
_ Mais encore ?
_ Ca peut être un caillou.
_ Oui, ça peut être un caillou.
_ Ca peut-être un début de paroi rocheuses.
_ Derrière cette paroi rocheuse, que vois-tu ?
_ Je ne vois rien !
_ Mais si ! Regarde derrière cette paroi rocheuse. »
Le travail de l’imaginaire commençait. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.11

« Tu as déjà oublié ce que je t’ai enseigné sur l’effacement, l’oubli de soi. Si tu veux travailler les perceptions infinies à travers les lavis d’encre, il faut une attitude d’humilité, de transparence ; c’est seulement ainsi que tu feras naître dans tes peintures une présence subtile. Si tu arrives fière de toi, sûre de vaincre, tu basculeras dans la trivialité. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.118

« Le beau en peinture, selon l’enseignement des vieux maîtres, disait maître Huang, n’est pas le beau tel qu’on l’entend en Occident. Le beau, en peinture chinoise, c’est le trait animé par la vie, quand il atteint le sublime du naturel. Le laid ne signifie pas la laideur d’un sujet qui, au contraire, peut être intéressante : si elle est authentique, elle nourrit un tableau. Le laid, c’est le labeur du trait, le travail trop bien exécuté, léché, l’artisanat.
Les manifestations de la folie, de l’étrange, du bizarre, du naïf, de l’enfantin sont troublantes car elles existent dans ce qui nous entoure. Elles possèdent une personnalité et une saveur propres, une intelligence. Ce sont des humeurs qu’il faut développer. Toi, en tant que peintre, tu dois saisir ces subtilités. Mais l’adresse, l’habileté, la dextérité qui, en Occident, sont souvent considérées comme une qualité, sont un désastre, car on passe à côté de l’essentiel. La maladresse et le raté sont bien plus vivants. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.122

« Le raté n’est pas mauvais du tout. La faiblesse peut même être d’une élégance folle. La maladresse, si elle vient du cœur, est bouleversante. Ce que tu viens de faire là est bouleversant. La maladresse peut même constituer l’esprit du tableau. Si l’expression est sincère, elle habitera forcément l’esprit qui la contemple.
Garde le côté cru, la fraîcheur dans le rendu. Les légumes crus qui conservent leur saveur sont meilleurs et plus nourrissants que s’ils sont mijotés en sauce et longuement préparés. Il faut œuvrer à la fois avec liberté et rectitude. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.122

« C’est dans l’inachevé qu’on laisse la vie s’installer. Si on tente d’achever le tableau, disait le maître, il meurt. On rajoute toujours un coup de pinceau en trop. Recherche sans cesse et sans répit le singulier, l’insolite, détruis les frontières ou catégories esthétiques forgées par nos cultures et n’aie pas peur de paraître parfois folle ou excentrique car il s’agit de retrouver les mille et une manifestations de la nature des choses. C’est primordial pour la recherche d’un peintre. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.122

« Pour les Tibétains comme pour les tribus africaines, les vieux philosophes du Moyen Âge ou les grands maîtres calligraphes zen, le cercle est le point central : vide nourricier, plénitude première, lieu de naissance de tout ce qui est. Cette sorte de « cosmogramme » représentait l’expérience du sacré, la diversité du monde dans l’unité. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.171

« Assez de sornettes ! Interférer en politique, c’est remplacer son idéal par la rouerie des compromis, s’entraîner à se leurrer soi-même. Les hommes politiques sont, comme ceux qu’ils gouvernent, les jouets de situations qui les dépassent. Oui, tu peux changer le monde, et même en profondeur, non par la politique qui ne sait qu’osciller entre la domination des uns et la soumission des autres mais par ton art. Dis moi, quel empereur, quel chef ont autant transformé la société que ceux qui ont inventé la scie et le rabot, la roue et l’horloge, la voiture et l’avion ? Pourtant, tu serais bien incapable de me citer leur nom. Le Petit Livre Rouge n’est pas si vieux et il n’est déjà plus qu’un objet de collection recherché par les antiquaires, alors que Lao Zi et Confucius continuent à être lus. Ce sont les savants et les penseurs qui changent le monde, et aussi les artistes, de façon moins évidente, mais tout aussi féconde. Léonard de Vinci a changé le regard des occidentaux, et Wu Daozi celui des chinois. Tu veux aider autrui ? Alors cultive ta peinture, parfais ton art. Tu proposeras aux autres, au lieu de le leur imposer, un fil de pensée, une ouverture sur un ailleurs. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.192-193

« Comprends ceci : dans l’infiniment petit de l’espace de nos tableaux, nous ne faisons que reproduire l’infiniment grand du cosmos. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.195

« Il faut apprendre, puis oublier ce qu’on a appris, retrouver le naturel jusqu’à parvenir à créer sans effort. Cela paraît simple mais, en fait, il est très difficile de retrouver sa véritable nature, surtout à une époque où la famille, l’éducation, les règles sociales, la pression des autres, les modes, nous façonnent à notre insu. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.196-197

« Nourris ton esprit, pas seulement de connaissances livresques comme tant de gens, mais de la réalité qui t’entoure, de tes songes aussi _ entraîne-toi à rêver et à te souvenir de tes rêves une fois éveillée ; à les commander en réfléchissant, juste avant de t’endormir, à ce que tu souhaites que soit leur point de départ _, alors tu verras fonctionner la plus haute qualité de l’esprit qui est de produire des intuitions. Elles fuseront en grand nombre et il te suffira de transcrire cette poésie qui passe dans l’instant. Arrête de cogiter, d’essayer de comprendre ; oublie, oublie, et ton esprit comprendra « subitement » pour toi. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.203

« ...il m’expliqua le mot chinois yuun : « Dans son sens moderne, il veut dire rime mais de façon plus large, rythme. Celui-ci est capital en musique mais aussi dans les autres arts, comme l’art de vivre. Sans rythme, il n’y a pas d’art. Cependant, à l’origine, ce mot avait un autre sens ; il signifiait raffinement. Ce n’est pas un hasard si l’on est passé du raffinement au rythme ; on en a simplement réduit le sens. Cultive le raffinement dans tes pensées, dans ta conduite ; ainsi, tu seras plus humaine. Ce qui est inhumain et même à l’opposé de la vie, de son évolution, c’est la vulgarité et la violence. Les plantes, les animaux eux-mêmes n’ignorent pas le raffinement. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.208-209

« As-tu déjà vu, dans un temple, des médiums incarner une divinité ? C’est un spectacle rare aujourd’hui car il est considéré comme une superstition et interdit ; jadis, il faisait partie de toutes les fêtes religieuses. Les dieux se manifestaient aux humains en s’emparant de certains, dont l’âme s’absentait momentanément. Ces médiums entraient alors en transe. Insensibles à la douleur, ils pouvaient se couper la langue avec une épée, se flageller avec des boules hérissées de pointes sans souffrir ; il saignaient à peine et ne conservaient aucune cicatrice. Ils jouaient, dans cet état second, les rôles d’esprits ou de dieux, avec la gestuelle stylisée de l’opéra et naturellement, ne faisaient parler que des dieux qu’ils connaissaient. Les acteurs, quand ils incarnent un personnage sur scène, sont eux aussi possédés par leur rôle mais restent conscients. Vois-tu, le peintre doit imiter le médium mais, comme l’acteur, demeurer conscient. Il doit s’oublier complètement, se perdre pour devenir branche de prunus, bambou ou paysage. Il faut qu’il sente le bambou pousser en lui. Il n’aura plus alors besoin de réfléchir à la forme qu’il doit lui donner ; elle se présentera d’elle-même. C’est pour retrouver cet état, à mi-chemin entre le conscient et l’inconscient, où l’inconscient parle au conscient, que certains artistes ont peint en utilisant leurs cheveux trempés dans de l’encre ou en tenant leur pinceaux entre leurs orteils. D’autres ont eu recours à la méthode de la planchette : ils tenaient une baguette de sourcier à la pointe de laquelle ils fixaient un pinceau enduit d’encre et laissaient la baguette les guider sur le papier. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.210-211

« Il faut savoir maîtriser la faculté que nous possédons de nous débarrasser du carcan de la raison évidente. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.212

« Peindre c’est lutter comme au kung-fu ; celui qui libère le plus d’énergie gagne.
Méfie-toi des connaissances. Trop de connaissances tuent la création ; on ne sait plus où donner de la tête, on est assommé par leur diversité. Quand tu prépares un plat, tu n’utilises que les ingrédients nécessaires ; tu n’iras pas acheter des oignons si tu n’en as que faire. Même chose en art ; ne t’intéresse qu’aux connaissances dont tu as besoin pour faire ton omelette. Laisse aux universitaires cette coure éperdue vers les connaissances qu’ils ne savent même plus digérer, encore moins régurgiter. Apprends les techniques mais dépasse-les. Il faut que tes traits sur le papier soient empreints de vie, naissent d’eux-mêmes, surtout sans labeur ni relents livresques. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.213

« La forme naît de l’informe : il ne faut pas avoir peur du chaos. Prends un pot par exemple : c’est le vide qu’il enferme qui crée le pot. Toute forme ne fait que limiter du vide pour l’arracher au chaos. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.213

« L’acte de peindre doit être l’agir du non-agir, l’agir naturel, sans désir, qui n’est pas tourné vers le moi. C’est par l’oubli de soi que l’on obtient la fusion avec le Ciel, avec le Tout. Cesse de penser, de vouloir, de calculer. Instaure en toi la non-contrainte totale pour être en harmonie avec la source de ton cœur. Fuis le rationnel, le conventionnel. Quand cette source où tu bois le meilleur de ton œuvre se tarit, ne te force pas, n’essaie pas d’extraire à tout prix, avec efforts, l’inspiration qui passe, aussi fugitive que le désir. Sors, promène-toi, parle à ton oiseau. Et ne regrette rien : tu n’aurais créé qu’une œuvre morte. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.214

« L’erreur est d’avoir soumis l’art à la politique ; il en résulte des œuvres didactiques. Je te l’ai dit, le critère, en art, n’est pas le beau, notion subjective qui varie suivant les lieux et les époques, mais la sincérité, l’authenticité. Les statues socialistes sont des échecs, non parce qu’il s’agit d’œuvres de commande mais parce qu’elles prétendent représenter l’esprit des travailleurs alors qu’elles sont réalisées par des gens qui ne sont pas des travailleurs. De même pour l’art actuel qui s’inspire du folklore ou des estampages de pierres gravées qui décoraient les tombes ; il se prétend le continuateur de l’art populaire. Quelle outrecuidance de parler ainsi au non des paysans ou des ouvriers quand on n’ignore tout de leur mode d’existence ! Quelle prétention que de soutenir que l’on sait mieux qu’eux ce qu’ils souhaitent, et même ce qu’ils pensent ! Nos souffrances viennent en grande partie du fait que les dirigeants du Parti stipulent qu’ils ont le monopole de ce qui est bon pour le peuple. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.215

« ... comme dit un proverbe chinois, une conversation en apprend souvent plus qu’une charretée de livres... »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.218

« Dans la clarté d’une glaçure ou la brillance lumineuse d’une porcelaine, nos pensées troubles disparaissent sans laisser de traces. L’objet est reposant. Il possède réellement un pouvoir magique sur l’individu qui le contemple. Inconsciemment, inlassablement, peut-être recherchons-nous l’esprit originel. Tu dois savoir que ces objets de lettrés sont un ressourcement infini pour le peintre, le point de départ de toute méditation, de toute création. Tu en auras besoin autour de toi, dans ton atelier. Je ne parle pas, ici, de « natures mortes » comme vous dites en Occident, mais de « natures vivantes ». Comme nous, ces objets portent l’émouvante patine du temps. Ils sont gardiens de secrets. Ne crois pas qu’ils se livrent facilement ! »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.267

« On trouve, à Pékin, des amateurs qui élèvent des pigeons et leur attachent aux pattes de minuscules sifflets/. Quand les cages sont ouvertes ils s’envolent et, selon la forme des sifflets et les arabesques qu’ils dessinent dans le ciel, se crée une véritable symphonie où chacun joue sa partition ; chaque sifflet est comme un instrument de musique différent. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.268

« J’ai compris que l’extase, qu’elle se crie ou se taise, n’est pas un don du Ciel qu’on attend les bras croisés, mais qu’elle se conquiert, se façonne, et que l’intelligence y a aussi sa part. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.285

« La qualité d’une œuvre ne tient pas au talent inné de son créateur, même s’il est nécessaire au départ, ce qui n’est pas sûr. La différence réside dans la persévérance, la volonté acharnée de poursuivre. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.288

« J’ai appris, à la lumière du taoïsme et du bouddhisme, qu’il est possible de diriger son esprit dans une direction choisie, pas seulement de le laisser éduquer par la société qui nous environne ; et qu’à travers l’ascèse, celle-ci une fois dépassée, on pouvait atteindre l’inaccessible étoile : un grain de sagesse qui est aussi, heureusement, un grain de folie ! »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.289

« Pour moi, l’acte de peindre porte en gestation toutes les modernités possibles. »
in Passagère du silence, éd. Albin Michel, 2003, p.293

PAUL VERLAINE : 1844-1896, poète français,
« Surtout laisse dire. Surtout sois joyeux. »

CLAUDE VIALLAT : peintre français né en 1936, chef de file, jusqu’en 1971, du groupe SUPPORT-SURFACE.
« Tout ce qui est usé et abandonné m’intéresse… Souvent quand un bois est trop parfait… alors je le marque d’une prise rouge, verte ou noire. »

« Quand je peins, j’essaie d’avoir le moins d’idées possibles, d’être le plus à l’écoute de ce qui vient. J’analyse mon travail après. »

« En peinture, j’ai toujours le sentiment de me surprendre, tout me prend à contre-pied. Longtemps, j’ai dessiné des projets que je ne faisais jamais, façon de les évacuer. »

« La forme n’est jamais dessinée que par des fragments de forme ou de contre-forme, la suggestion d’un fragment donne la forme neuve… Toutes mes toiles sont un fragment de quelque chose qui se continue… Le dessin, le croquis, c’est un peu comme l’écriture. C’est très épisodique. J’ai envie de dessiner grâce à une qualité de papier, ou à une qualité d’outils… Ma forme me laisse entièrement libre de réinventer à chaque fois une technique et des effets de couleurs. »

« Considérer le transparent comme la couleur, comme couleur et l’utiliser comme tel, et ne pas séparer la couleur de l’espace et l’espace de la matière. »

« Travailler la couleur en tant que marquant en tenant la valeur et le ton comme obligatoires, en ne lui conférant aucune symbolique, impose de ne pas la particulariser, ni lui donner la préférence, mais de l’accepter dans sa matérialité. Elle n’est plus alors un véhicule d’expression mais celui du travail qui l’utilise et la produit, pâteuse, fluide, ductile, solide ou poudreuse. »

« … les bords de la toile sont peints eux aussi et la toile prend le mur, s’ouvre, compose avec le mur lui-même, devient élément d’un tableau qui est le mur, le sol , le plafond, l’espace de la pièce et l’espace extérieur. »

« La mise en situation et le positionnement de la toile ou objet au moment du travail, son format, vont déterminer tous les gestes de la fabrication, conditionner la couleur dans sa densité (fluide ou épaisse) et dans les effets secondaires qui en découlent…, autant de marques qui s’inscrivent dans la chair de la toile en appréhension corporelle, gesticulation et sens. »

LEONARD DE VINCI : 1452-1519, peintre, artiste, musicien, poète, architecte, botaniste, ingénieur, sculpteur et philosophe italien
« Dans les choses indéfinies, l’esprit s’éveille à de nouvelles inventions. » (à propos de taches sur un mur).

« Si tu regardes des murs souillés de beaucoup de taches ou faits de pierres multicolores, avec l’idée d’imaginer quelque scène, tu y trouveras l’analogie de paysages au décor de montagnes, rivières rochers, arbres, plaines, larges vallées et collines de toutes sortes. Tu pourras y voir aussi des batailles et des figures aux gestes vifs et d’étranges visages et costumes et une infinité de choses, que tu pourras ramener à une forme nette et compléter. » (BN 2038 22b)

« Les sens ressortissent à la terre ; la raison, à l’écart, reste contemplative. »

« Observe bien, peintre, la partie la plus laide de ton corps et concentre tes études sur elle de façon à te corriger. Car si tu es brutal, tes figures le seront aussi et elles seront dépourvues d’esprit ; ainsi tout ce qui est bon ou mauvais en toi transparaîtra d’une manière ou d’une autre dans tes figures. »
(cité par José Saramago in Manuel de peinture et de calligraphie p37).

BILL VIOLA : artiste vidéaste maéricain, né en 1951
« La vidéo traite de la lumière et de l’eau _ elle devient un fluide au sein du tube vidéo. »

« Il n’y a pas de discontinuité, d’immobilité dans le temps. Quand on fait de la vidéo, on interfère dans ce processus continu… »

PAUL VIRILIO : urbaniste et essaiyste français, né en 1932
« Je rappelle que l’art est sorti du corps, du corps de la danse et du théâtre, des peintures de guerre et des tatouages. Le travail de Lucy Orta m’a semblé de même nature que des peintures rupestres qui viendraient se dessiner sur le corps. »

W

JEFF WALL : photographe canadien, né en 1946.
« L’expérience du beau est toujours associé à l’espoir et comme le dit STENDHAL, l’art est une promesse de bonheur. »

ANDY WARHOL : 1928-1987, artiste et cinéaste américain, apparenté au Pop Art.
« C’est dur de ressembler à l’exacte contraire de ce que l’on est par nature, et surtout d’imiter ce qui n’était au départ qu’une femme imaginaire. »

« Je pense que tout le monde devrait être une machine. Je pense que tout le monde devrait aimer tout le monde. »

« Si vous voulez tout savoir sur Andy Warhol, vous n’avez qu’à regardez la surface de mes peintures, de mes films, de moi. Me voilà, il n’y a rien dessous. »

« Mon œuvre n’a aucun avenir. Je le sais. Quelques années. Evidemment, mes choses ne voudront rien dire. »

« Une usine est un endroit où on construit des choses. C’est là que je fais, ou que je construis mes œuvres. Dans mon travail artistique, la peinture à la main prendrait trop de temps, et de toute façon ce n’est plus de notre époque. Les moyens mécaniques sont d’aujourd’hui. En les employant, je peux apporter l’art a plus de gens. L’art devrait être pour tout le monde. »

« (...) La sérigraphie est une méthode aussi honnête que les autres, y compris la peinture à le main. »

« L’art à l’échelon industriel est l’étape qui suit l’art avec un grand A. J’ai commencé dans l’art commercial, et je veux finir avec une entreprise d’art. Après avoir fait ces choses que l’on appelle art ou peu importe comment, je suis entré dans l’art industriel. Je voulais être un bon industriel d’art ou un bon artiste industriel. Être bon en affaires, c’est la forme d’art la plus fascinante. »

« C’est dur d’être créatif et c’est dur aussi de ne pas penser que ce qu’on fait est créatif, ou de ne pas être jugé créatif, parce que tout le monde ne parle que de ça et de l’originalité. On est tous créatifs tout le temps. Et ça fait un drôle d’effet quand on dit que des choses ne le sont pas, comme si la chaussure que je dessinais pour une pub était une création mais pas le dessin de cette chaussure. Je trouve que les deux se valent. J’étais payé pour ça et je faisais tout ce qu’on me demandait. (...) Je devais inventer et plus maintenant. Après toutes les retouches, les dessins avaient une atmosphère, ils avaient un style. L’attitude de ceux qui me passaient les commandes n’était pas indifférente. Ils savaient ce qu’ils voulaient, ils insistaient, et quelquefois ils prenaient un ton passionnel. Le travail dans l’art commercial était mécanique, mais les gens avaient des sentiments. »

« J’adorais cette idée de la toile vide et je regrettais de ne pas avoir continuer à peindre toujours la même peinture, par exemple la boite de soupe et rien d’autre. Quand quelqu’un en veut une, eh bien on en fait une autre. Est-ce que quelqu’un fait ça maintenant ? De toute façon, on fait la même peinture qu’elle est l’air différente ou non. »

« Je prends toujours mes idées chez les autres. Quelquefois, je modifie l’idée pour l’adapter à un projet précis sur lequel je travaille à ce moment. Quelquefois, je n’y change rien. Ou alors, je n’utilise pas l’idée tout de suite, mais je la garde en mémoire et je l’utilise pour quelque chose, plus tard. J’adore les idées. »

« Ma série des morts se partageait en deux, d’un côté les morts célèbres et de l’autre les gens dont personne n’a jamais entendu parler. (...) Ca ne veut pas dire que je m’apitoie sur eux, mais simplement que les gens passent leur chemin et que ça ne leur fait rien si un inconnu est mort. (...) Je fais encore attention aux gens mais ce serait bien plus facile de ne pas faire attention, c’est trop dur de faire attention. Je ne veux pas trop m’approcher. Je n’aime pas toucher les choses, c’est pourquoi mes œuvres sont si éloignées de moi. »

« En réalité, tu vois, ce n’était pas l’idée des accidents et des choses comme ça, c’est un truc tout simple. Tout est parti des boutons, ça fait longtemps que j’aimerai savoir qui a inventé les boutons et puis j’ai pensé à tous ces gens qui ont travaillé sur les pyramides... Je me suis toujours un peu demandé ce qui pouvait bien leur arriver, pourquoi ils ne sont nulle part. Alors je me disais toujours que ce serait quand même plus simple de faire une peinture des gens morts dans des accidents de voiture, parce que quelquefois, tu vois, on ne sait absolument pas qui c’est. (...) Les gens dont on sait qu’ils veulent faire des choses et ils ne les font jamais, ils disparaissent si vite, et puis ils se font tuer ou quelque chose comme ça, tu vois, personne n’est au courant. Je me suis dit que j’allais peut-être faire une peinture sur une personne qu’on ne connaît pas ou un truc comme ça. »

« J’ai fait mes premiers films avec un seul acteur qui faisait la même chose pendant des heures à l’écran : manger, dormir ou fumer. J’ai fait ça parce que, d’habitude, les gens vont au cinéma juste pour voir la vedette, pour la dévorer. Alors, là au moins, on a une occasion de ne regarder que la vedette aussi longtemps qu’on veut, sans se soucier de ce qu’elle fait, et de la dévorer autant que l’on a envie. Et puis, c’est plus facile à faire. »

« J’ai commencé à faire des sérigraphies en août 62. La méthode du tampon en caoutchouc que j’utilisais pour répéter des images m’a brusquement paru trop artisanale. Je voulais quelque chose qui donne davantage l’effet de la production à la chaîne. Avec la sérigraphie, on prend une photo, on l’agrandit, on la reporte à la colle sur la soie, et puis on étale l’encre dessus et l’encre passe au travers la soie mais pas à travers la colle. Comme ça, on obtient la même image, un peu différente chaque fois. C’était tellement simple, rapide, imprévisible. J’étais enchanté. »

« Je vois tout de cette façon : la surface des choses, une sorte de braille mental. Je passe simplement la main sur la surface des choses. »

« Je n’ai jamais voulu être peintre. Je voulais être danseur de claquettes. »

« J’aime les choses barbantes. J’aime que les choses soient exactement pareilles encore et encore. »

« On a souvent cité cette phrase de moi : j’aime les choses barbantes. Eh bien, je l’ai dit et c’est ce que je pense. Mais cela ne veut pas dire que ces choses ne me barbent pas. Bien sûr, ce que je trouve barbant ne doit pas le paraître à d’autres, car je n’ai jamais pu regarder jusqu’au bout les émissions d’aventure à la télé, parce que ce sont à peu près les mêmes intrigues, les mêmes plans et les mêmes montages encore et encore. Apparemment, la plupart des gens adorent regarder à peu près la même chose du moment que les détails changent. Moi, c’est tout le contraire. Si je dois regarder la même chose que la veille qu soir, je ne veux pas que ce soit à peu près la même, je veux que ce soit exactement la même. Parce que plus on regarde exactement la même chose, plus elle perd son sens, et plus on se sent bien, avec la tête vide. »

« Je me considère comme un artiste américain. J’aime ce pays, je le trouve formidable. Il est fantastique. J’aimerai travailler en Europe, mais je ne ferais pas les mêmes choses. Je ferais des choses différentes. Je crois que je représente les Etats-Unis dans mon art, mais je ne fais pas de critique sociale. Je peins ces objets dans mes tableaux tout simplement parce que ce sont ceux que je connais le mieux. Je ne cherche absolument pas à critiquer les Etats-Unis, ni à dénoncer une quelconque laideur. Je suis purement un artiste, il me semble. Mais je ne saurai pas dire si je me prends au sérieux comme artiste. Je n’y ai jamais pensé. D’ailleurs, je ne sais pas ce qu’on pense de moi dans la presse. »

« Chacun a son Amérique à soi, et puis des morceaux d’une Amérique imaginaire qu’on croit être là mais qu’on ne voit pas. Quand j’étais petit, je n’étais jamais sorti de la Pennsylvanie, et j’imaginais des choses que je croyais vraies sur le Midwest, ou le Sud ou le Texas, et je me sentais privé de ces choses. Mais on ne peut vivre sa vie qu’à un endroit à la fois. Et sur le moment, la vie n’a aucune saveur, jusqu’à ce qu’elle devienne un souvenir. Les recoins imaginaires de l’Amérique semblent savoureux parce qu’on les a créés par bribes, d’après des scènes de films, des musiques, des passages de livres. Et on vit dans son Amérique de rêve qu’on s’est confectionnés sur mesure avec de l’art, des émotions et du sentimentalisme, tout autant qu’on vit dans la vraie. »

« Ce qui est formidable dans ce pays, c’est que l’Amérique a inauguré une tradition où les plus riches consommateurs achètent en fait les mêmes choses que les plus pauvres. On peut regarder la télé et voir Coca-cola, et on sait que le président boit du Coca, que Liz Taylor boit du Coca et, imaginez un peu, soi-même on peut boire du Coca. Un Coca est toujours un Coca, et même avec beaucoup d’argent, on n’aura pas un meilleur Coca que celui que boit le clodo du coin. Tous les Cocas sont pareils et tous les Cocas sont bons. Liz Taylor le sait, le président le sait, le clodo le sait, et vous le savez. »

« On récrit tout le temps les livres d’histoire. Peu importe ce que vous faites. Tout le monde continue simplement à penser la même chose, et plus ça va plus c’est pareil. Ceux qui parlent le plus d’individualité sont ceux qui refusent le plus les différences. Ca pourrait être l’inverse d’ici quelques années. Un jour, chacun pensera exactement ce qu’il a envie de penser, et alors tout le monde aura probablement les mêmes opinions. On dirait ce qui se passe actuellement. »

« Quelqu’un a dit que Brecht voulait que tout le monde ait les mêmes opinions. Je veux que tout le monde ait les mêmes opinions. Mais Brecht voulait y parvenir par le communisme, d’une certaine façon. La Russie le fait sous les ordres du gouvernement. Ici, c’est en train d’arriver tout seul, en dehors de tout gouvernement strict. Donc, si ça marche sans qu’on ne fasse rien, pourquoi ça ne marcherait pas sans qu’on devienne communistes ? Tout le monde a la même allure et le même comportement, et de plus en plus. »

« Les tableaux, j’ai essayé de les faire à la main, mais je trouve que c’est plus facile avec l’écran de sérigraphie. Comme ça, je n’ai pas du tout besoin de travailler sur les objets que je fais. Un de mes assistants, ou n’importe qui d’autre, peut reproduire le motif tout aussi bien que moi. »

« Mes peintures ne correspondent jamais à ce que j’avais prévu, mais je ne suis jamais surpris. »

« Quand je suis obligé de réfléchir à un tableau, je sais que ça ne va pas. Et déterminer les dimensions, c’est une façon de réfléchir, déterminer les couleurs aussi. Mon instinct de peinture me dit : Si tu ne réfléchis pas, c’est bon. Dès qu’on doit décider et choisir, ça ne va plus. Plus on décide, moins ça va. Il y en a, ils peignent de l’abstrait, alors ils restent à réfléchir parce que ça leur donne l’impression de faire quelque chose. (...) »

« Tout le monde est très beau, ou alors personne. »

« A l’avenir chacun aura son quart d’heure de célébrité mondiale. »

« Plus on allait vers l’ouest, plus les autoroutes avaient l’air pop. Tout d’un coup, on s’est tous fait l’effet d’être des initiés, parce que pour nous, le pop s’était le nouvel art, même s’il était partout : c’était ça le truc, la plupart des gens trouvaient ça évident, alors qu’on était tous éblouis. Une fois qu’on est pop, on ne peut plus voir les signaux de la même façon. Et une fois qu’on a commencé à penser pop, on ne peut plus voir l’Amérique de la même façon. A partir du moment où on met une étiquette, on franchit un pas. Je veux dire, on ne peut plus revenir en arrière et voir la chose sans son étiquette. On voyait l’avenir et ça ne faisait aucun doute. On voyait les gens passer devant sans le savoir, parce qu’ils pensaient encore comme autrefois, avec des références au passé. Mais il suffisait de savoir qu’on était dans l’avenir, et c’est comme ça qu’on s’y retrouvait. Il n’y avait plus de mystère, mais les surprises ne faisaient que commencer. »

« Les artistes pop faisaient des images que tous les passants de Broadway pouvaient reconnaître en un quart de seconde : des bandes dessinées, des tables de pique-nique, des pantalons, des personnes célèbres, des rideaux de douches, des réfrigérateurs, des bouteilles de Coca... toutes ces choses modernes formidables, que les expressionnistes abstraits s’efforçaient de ne surtout pas remarquer. »

« Quand on y songe, les grands magasins sont un peu comme des musées. »

« Je ne crois pas que ce soit bientôt la fin du pop’art. Les gens s’i intéressent et l’achètent encore, mais je ne saurais pas vous dire ce que c’est que le pop’art, c’est trop compliqué. Ca consiste à prendre ce qui est dehors et à le mettre dedans, ou à prendre le dedans et à le mettre dehors, à introduire les objets ordinaires chez les gens. Le pop’art est pour tout le monde. Je crois que l’art ne devrait pas être réservé à quelques privilégiés, je crois qu’il doit s’adresser à la masse des américains, et d’ailleurs ils sont généralement ouverts à l’art. Je pense que le pop’art est une forme d’art tout aussi légitime que les autres, l’impressionnisme, etc. Ce n’est pas de la frime. Je ne suis pas le grand prêtre du pop’art, je suis simplement un de ceux qui travaillent là-dedans. Je ne m’inquiète ni de ce qu’on écrit sur moi ni de ce que les gens peuvent penser de moi en le lisant. »

« Tous mes films sont artificiels, et d’ailleurs tout est plus ou moins artificiel. Je ne sais pas où s’arrête l’artificiel et où commence le réel. »

« Si je dois donner un rôle à quelqu’un, je choisis la mauvaise personne. Je suis incapable d’imaginer la bonne personne dans son rôle. La bonne personne pour son bon rôle, ce serait dingue. En plus, aucune personne n’est jamais tout à fait la bonne, parce qu’un rôle au cinéma n’est jamais réel. Alors si on ne peut pas trouver quelqu’un qui convienne parfaitement, il vaut mieux trouver quelqu’un qui soit parfaitement à côté de la plaque. Au moins, on sait qu’on a vraiment quelque chose. »

« Ce qu’on avait à proposer, à l’origine, j’entends, c’était un contenu nouveau et plus libre, un regard sur les gens de la vie réelle. Et même si nos films n’étaient pas très soignés techniquement, jusqu’en 76 le cinéma underground est resté l’un des rares domaines où les gens pouvaient trouver des choses sur des sujets interdits et voir pour de bon des scènes de la vie moderne. »

« Je pense que le cinéma doit absolument flatter les instincts lubriques. Je veux dire, avec cette vie actuelle, les gens sont de plus en plus coupés les uns des autres. Le cinéma doit exciter. Les films de Hollywood ne sont que de la publicité entièrement calculée. Blue Movie était réel. On ne voulait pas faire de la pornographie. C’était un exercice, une expérience. Mais je crois vraiment que le cinéma doit exciter les gens, doit les passionner pour d’autres gens, doit être lubrique. »

« Quand on lit Genet, on se met dans un état pas possible, et du coup, certaines personnes disent que ce n’est pas de l’art. Ce que j’aime chez lui, c’est qu’il vous fait oublier le style et c’est sortes de choses. Le style n’a vraiment pas d’importance. »

« Je trouve que les films deviennent des romans, et c’est formidable que des gens comme Norman Mailer ou Susan Sontag fassent aussi des films maintenant. C’est la nouvelle forme de roman. Plus personne ne lira désormais. C’est plus facile de faire des films. Le genre de film qu’on fait, c’est comme le livre de poche. Moins cher que les gros bouquins. Les étudiants n’ont plus besoin de lire. Ils peuvent regarder des films, ou les faire. »

« Je ne lis jamais. Je regarde seulement les images. »

« Avant qu’on m’est tiré dessus, je croyais toujours que j’étais plutôt à moitié présent que tout à fait présent. Je me demandais toujours si je ne regardais pas la télé au lieu de vivre ma vie. Quelquefois, les gens disent que la façon dont les choses se passent dans les films n’a rien de réel, mais en fait, c’est la façon dont les choses se passent dans la vie qui n’est pas réelle. Les films donnent de la force et de la réalité aux émotions, alors que si des choses arrivent dans la vie, c’est comme si on regardait la télé, on ne ressent rien. Au moment même où j’ai été blessé, et depuis ce moment là, j’ai su que je regardais la télé. On change de chaîne, mais c’est toujours la télévision. Quand on est directement mêlé à quelque chose, en général, on pense à autre chose. Quand il se passe quelque chose, on en imagine d’autres. Quand je me suis réveillé quelque part (je ne savais pas que c’était l’hôpital, et que Bob Kennedy s’était fait tirer dessus un jour après moi), j’entendais des paroles imaginaires sur des milliers de gens qui priaient et faisaient des scènes, et puis j’ai entendu le mot Kennedy et ça m’a ramené dans le monde la télévision parce que je me suis rendu compte que, bon, j’étais là, et j’avais mal. »

« Le truc, c’est de penser à rien. (...) Ecoutez, le rien, c’est passionnant, c’est séduisant, c’est pas embêtant. (...) »

« Avant les médias, il y avait une limite physique à l’espace qu’une personne pouvait occuper toute seule. Les hommes, il me semble, sont les seules créatures capables de prendre plus de place qu’ils occupent en réalité, parce qu’avec les médias, on peut s’installer chez soi tranquillement et occuper en même temps toute la place sur des disques, dans les films, de manière plus intime au téléphone et la moins intime possible à la télévision. »

« Je trouve que nous sommes un espace vide ici, à la Factory, c’est formidable ; j’aime être un espace vide. Ca me permet d’être tranquille pour travailler. Mais on est embêtés, on a des flics qui viennent tout le temps. Ils croient qu’on fait des choses abominables, et ce n’est pas vrai. »

« De temps en temps, quelqu’un m’accusait de faire le mal, de laisser les gens se détruire sous mes yeux afin de les filmer et de les enregistrer. Mais je ne crois pas être foncièrement mauvais. Je suis simplement réaliste. J’ai appris très jeune que si je deviens agressif, et si j’essaie de dire à quelqu’un ce qu’il doit faire, ça ne sert à rien, il ne se passe rien du tout. J’ai appris qu’en fait on a plus de pouvoir quand on se tait, parce que là, au moins, les gens peuvent se remettre en question. Quand les gens sont prêts, ils changent. Ils ne le font jamais avant, et parfois, ils meurent avant d’être arrivés là. On ne peut pas les faire changer s’ils n’en ont pas envie, et inversement, quand ils en ont envie on ne peut pas les en empêcher. »

« Vous avez vraiment des maux de société quand tout le monde en arrive à jouer à travailler. La seule raison de jouer sérieusement c’est de travailler sérieusement, et non l’inverse comme le croient la plupart des gens. »

« Il y a tellement de concurrence ici (à New York) que le seul moyen de d’en tirer, c’est d’adopter un style dont les autres ne veulent pas. »

« Je dois me faire une idée très approximative du travail, parce que je trouve que le seul fait de rester en vie, c’est beaucoup travailler à quelque chose qu’on a pas toujours envie de faire. Quand on naît, c’est comme si on se faisait kidnapper. Et puis vendre comme esclave. Les gens travaillent tout le temps. La machine fonctionne sans arrêt. Même quand on dort. »

« Je n’ai jamais compris pourquoi, quand on meurt, on ne disparaît pas tout bonnement. Tout pourrait continuer comme avant, à la seule différence qu’on ne serait plus là. J’ai toujours pensé que j’aimerai avoir une tombe sans rien dessus. Pas d’épitaphe, pas de nom. J’aimerai en fait qu’on lise dessus : fiction. »
toutes citations précédentes tirées de Andy Warhol Rétrospective, catalogue de l’exposition rétrospective présentée au Centre Georges Pompidou du 21 juin au 10 septembre 1990, éditions du centre Pompidou, Paris, 1990.

« C’est à la surface que le vivant se trame. »

« Supposons que vous soyez sur le point d’acheter un tableau de 200 000 dollars. A mon avis, vous feriez mieux de prendre cet argent, d’en faire une liasse et de l’accrocher au mur. Quand on vous rendrait visite, la première chose qu’on verrait serait l’argent au mur. »

LAURENCE WEINER : artiste conceptuel américan, né en 1942.
« L’artiste peut réaliser le travail. _ Le travail peut être réalisé par quelqu’un d’autre. _ Le travail ne doit pas nécessairement être réalisé. »

OSCAR WILDE : 1854-1900, écrivain et poète irlandais
« Comment a-t’on pu dire que l’homme est un animal raisonnable ! Il est tout ce qu’on veut sauf raisonnable ! » (in Phrases et philosophies).

« Aimer c’est se surpasser. » (in Le portrait de Dorian Gray).

WIRGINIA WOOLF : 1882-1941, femme de lettres et féministe anglaise
« La vie est un rêve, c’est le réveil qui nous tue. »

Y

MARGUERITE YOURCENAR : 1903-1987, écrivaine d’origine belge.
« J’ai accepté la pureté comme la pire des perversions »

« Le véritable lieu de naissance est celui où l’on a posé pour la première fois un coup d’œil intelligent sur soi-même. »
(in Les mémoires d’Hadrien).

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